Avoir confiance et donner confiance : un défi pour les organisations


La crise sanitaire telle que nous la traversons depuis le mois de mars 2020 a des répercussions à tous les niveaux. Avant tout, la tristesse des conséquences de l’épidémie au niveau national et mondial. Ensuite, le capital confiance bien entamé dans la société en général, et dans les organisations également.

Cette réalité devient plus palpable lorsqu’on se rappelle qu’une crise (peu importe son origine) est toujours accompagnée d’une perte de confiance. Une crise déstabilise l’existant, remet en cause l’autorité, enlève les repères. Bertrand Robert, dans un livret édité en 2005 pour un colloque de l’armée de l’air, présente les différentes clés de la confiance sous la forme d’une boussole qui sert à « naviguer par visibilité stratégique réduite ou nulle » (Livret Argillos « Le courage de faire face aux risques », Ecole militaire, décembre 2016). 

Les points présentés ici sont des clés précieuses provenant de notre expérience et de celle d’autres experts, pour toute personne ayant la responsabilité d’une organisation, de plusieurs équipes, ou d’une seule équipe, afin de reconstruire le socle le plus stable qui soit dans la relation de travail : la confiance mutuelle.

Une boussole efficace

Avant de commencer à naviguer, il faut s’assurer de l’état du matériel existant. Pour cela, demandez-vous quel est le niveau de confiance déjà existant dans l’organisation, dans l’équipe ? Cette base est-elle positive ou faut-il compenser une base plutôt négative ? Cela dépend en grande partie de l’histoire de l’organisation avant la crise.

Si les 6 clés de cette boussole pointant au « cap confiance » vous semblent relever du bon sens, rappelez vous que la crise bouscule les repères et apporte stress et peurs, avec des réactions de déni, de fuite, de défense agressive ou de paralysie. Appliqués, ces 6 points maintiennent la souplesse de l’organisation et son adaptabilité face aux chocs.

  1. Transparence : cette ouverture dans la communication est visible grâce à des informations claires, fluides et sincères. Pour y parvenir, un responsable d’organisation ou d’équipe fera au mieux pour rendre les informations faciles d’accès, compréhensibles, exemptes d’erreurs ou de flous volontaires, et axées sur les attentes des récepteurs de l’information.
  2. Exemplarité, honnêteté : en pleine perte de repères, un responsable qui lutte contre la crise et défend l’intérêt général est moteur de la confiance. Pour ce faire, il peut donner du sens en mettant des mots sur les risques potentiels, énoncer les règles, et montrer l’exemple sur le terrain (un comportement prévisible est toujours source de confiance). L’honnêteté emporte l’idée de cohérence entre les paroles et les actions, l’expression honnête de ses sentiments, ainsi que de maturité, c’est-à-dire avoir des attitudes relationnelles dépourvues de manipulation et d’agressivité.
  3. Compétence : une crise signifie aussi bien souvent un manque de connaissance sur le problème en cours. Solliciter le meilleur niveau possible d’expertise à l’instant T et garder de la transparence sur le degré de connaissances et d’incertitudes sur le sujet contribue à construire/rétablir la confiance.
  4. Cohérence : la confiance repose sur un « alignement entre ce que l’on est, ce que l’on fait et ce que l’on dit ». Un responsable peut donner ce sentiment de cohérence en alignant son discours sur celui émis par l’ensemble de l’organisation, et la réalité de terrain perçue par les acteurs eux-mêmes aux plans physiques, psychologiques, et économiques.
  5. Convergence, reconnaissance : quand la confiance est là chaque membre du groupe travaille dans la même direction pour atteindre le but recherché. A son niveau, le responsable peut encourager ce dynamisme positif en ayant un a priori positif sur chaque individu, convaincu que chacun travaillera au bien-être de l’ensemble. Estimer ses collaborateurs en cherchant leurs qualités est un bon exercice de cohésion d’équipe. Le responsable renforce ensuite la confiance en faisant preuve de reconnaissance envers tous ceux qui travaillent à la sortie de crise. Il prend aussi en compte les attentes déçues, les difficultés… en étant à l’écoute des situations particulières.
  6. Flexibilité : si la crise dure dans le temps, l’énergie déployée pour travailler dans le même sens va forcément s’étioler. La flexibilité, le fait de prendre les informations au jour le jour permet alors aux responsables et aux équipes de garder la souplesse mentale nécessaire pour durer. Faire preuve de bon sens c’est continuer de se référer aux informations des experts, rester simple dans ses pensées et ses actions, accepter de prendre en compte toutes les informations même si elles sont contraires à ce que l’on souhaite, et adapter le plan en place « minute par minute ». Cela s’applique notamment aux principes de précautions pris pour lutter contre l’avancée du Covid-19 : respecter le plan est indispensable mais garder de la souplesse en écoutant si possible les retours des différents acteurs de terrain est encore mieux.

Bien sûr, être responsable ne signifie pas être parfait. « Naviguer au cap confiance » en mettant en pratique les 6 clés qui font fonctionner la boussole demande une bonne dose de recul sur soi et la situation, et beaucoup d’humour, véritable antidote au stress et à la déprime. En tendant vers l’application de ces clés au mieux, vous voyez vos efforts récompensés par une augmentation progressive de la confiance mutuelle et un retour à la normale (ou plutôt « la nouvelle normale ») plus rapide.